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Ise Jingu 伊勢神宮

29 avril 2014

 

Ise… Ah, Ise

Qu’est-ce que cela inspire ? Quand on ne connaît pas, rien. Quand on connaît, ça inspire tellement. Ise, la ville dans laquelle on trouve le grand Ise Jingu. A nouveau, pour un non connaisseur, cela n’évoque à priori qu’un sanctuaire, dont la particularité est qu’il est entièrement doré, et cela peut laisser rêveur, cela peut pousser à vouloir le visiter juste pour cette couleur. Mais en poussant un peu plus loin, Ise Jingu, c’est aussi le sanctuaire le plus important du Japon. Un peu d’histoire…

 

Amaterasu no Ôkami. Ce nom est peut-être le plus important du Japon. Dans le Shintô et les mythologies, Amaterasu est la divinité du soleil. Le mot « Kami » qui s’en suit signifie « Divinité » en japonais, lorsque l’on désigne les divinités Shintô. Le « Ô » devant est purement honorifique. Et le « no », c’est un peu notre « du » dans cette phrase (déesse du soleil). Sa naissance remonte à fort, fort loin. Amaterasu est, en effet, considérée comme étant la mère de tous – mais là, tout devient compliqué. En effet, vénérée depuis des temps immémoriaux, lors de l’apparition du Kojiki (recueil de mythes sur l’origine du Japon et des Kami terminé en 712) et du Nihon Shoki (histoire des origines du Japon terminé en 720), Amaterasu est annoncée comme étant la mère des empereurs japonais. Cela a permis aux empereurs d’acquérir plus d’importance, et les a divinisés. Si l’empereur aujourd’hui n’a plus aucun pouvoir politique, il est considéré comme le descendant de Amaterasu et donc comme une personne divine.

 


 

Ce qu’il faut retenir (car mon explication est brève, tout cela ne s’apprends pas en quelques lignes), c’est que Amaterasu est la déesse du soleil et mère des empereurs (même si ce n’est pas vrai à vos yeux, c’est la vision qu’offre l’histoire des livres cités plus haut). Et comme vous l’avez compris, un sanctuaire sert à héberger une divinité. Au Japon, les Kami sont des êtres qui bougent, ils ne restent pas dans un lieu précis, ils peuvent s’incarner dans les arbres, les animaux… Et les sanctuaires servent donc de réceptacle pour le Kami. Dans les sanctuaires, on vénère le Kami en lui faisant des offrandes, en faisant des rituels, en venant prier…

 

J’y arrive. Ise Jingu, c’est ici-même qu’est « conservée » Amaterasu (je ne trouve pas de mot français. En anglais, on dit « enshrined », en français, on n’a pas de mot qui traduit cette idée de déposer un esprit quelque part). Le sanctuaire d’Ise est très grand, et est en fait séparé en 2 parties. La première partie, appelée Gekû (ou « sanctuaire extérieur »), est dédiée à Toyôke no Ôkami, une autre divinité. Je ne la connais pas vraiment, mais elle serait la déesse de l’agriculture et aurait été appelée à résider à Ise Jingu 1,500 ans auparavant afin de nourrir Amaterasu… Le sanctuaire dédié à Amaterasu est nommé Naikû (ou « sanctuaire intérieur » pour faire simple).

 


(photo d'une reproduction modèle réduit dans le Naikû)

 

Mais tiens, pourquoi ce sanctuaire se nomme Ise Jingu, et non Ise Jinja ? Le mot « Jinja » est utilisé lorsque l’on parle d’un sanctuaire, mais il existe de nombreux dérivés, comme « Taisha » qui signifie littéralement « grand sanctuaire » (mais j’ai déjà vu de tous petits Taisha abandonnés dans les montagnes), ou bien « Jingu » qui signifie qu’il est plus important car il a un lien avec les empereurs (il peut notamment renfermer l’esprit d’un empereur décédé). Ise est donc Ise Jingu, vous comprenez pourquoi maintenant.

 

Ise Jingu donc, est un sanctuaire complètement doré. Pour tout ce que j’ai mentionné plus haut, il était donc important pour moi, pour Edouard, et même je pense pour Papa et Maman, d’aller lui rendre visite. Il faut savoir que des milliers de japonais se rendent là-bas chaque année juste pour aller prier, et dépensent des fortunes pour s’attirer les bonnes faveurs de Amaterasu no Ôkami. Et bien nous y voilà, enfin ! Nous pénétrons par le premier Torii, bien sûr lui aussi doré. L’ambiance est… particulière.

 


(Photo du Naikû)

 

Au Japon, tout est une question de foi. Vous y croyez, ou vous n’y croyez pas. Quant à moi ? C’est compliqué. Mais j’ouvre mon cœur aux croyances des japonais. Et oui, arrivé à Ise, je peux dire qu’on ressent quelque chose dans les sanctuaires. Vraiment, il n’y a pas de mot, c’est une ambiance, un ressenti, que tous ne remarqueront peut-être pas. Nous marchons sur les graviers nous menant à Toyôke car nous sommes dans le Gekû. Nous approchons, marchant le long des palissades dorées. Sur notre gauche, une pierre est entourée de Shimenawa (la corde tressée) et de Shide (les papiers de bambous blancs qui pendent en forme « d’éclair »), et les japonais l’entourent, les bras tendus comme pour capter l’énergie qui s’en dégage. Tous vont se purifier à l’entrée du sanctuaire, tous sans aucune exception ; car oui, dans les sanctuaires normaux nombreux passent à travers la purification, pas ici, je n’ai pas vu un seul japonais l’éviter. Puis nous entrons dans l’entrée. Nous n’irons pas plus loin : le sanctuaire est trop sacré pour que des impurs puissent y pénétrer. Une palissade cache le sanctuaire plus loin, on ne voit que le toit. Tous les japonais s’alignent pour aller prier après avoir jeté des pièces, derrière le mur où l’on ne voit rien du tout. J’ai du mal à comprendre car personnellement, j’ai besoin de voir quelque chose, et cela me heurte. Mais pas eux, ils viennent, ils prient, ils repartent, ils n’ont pas besoin de voir, juste de croire et de ressentir. C’est un rituel, une tradition.

 

Nous ressortons. Alors, première impression ? Mitigée. Je sens l’immense déception de Papa et Maman. Le sanctuaire est neuf (tous les 20 ans selon la tradition, le sanctuaire est entièrement détruit et reconstruit un peu plus loin ; en 2013, cela faisait 20 ans et le sanctuaire a donc été reconstruit il y a moins d’un an), et on ne voit rien, rien du tout. On aperçoit tout de même le toit d’un bâtiment plus loin qui semble très vieux d’après la mousse et l’usure du toit, contrairement à ceux que l’on entrevoyait dans le cœur du sanctuaire. Edouard semble apprécier le lieu malgré tout, et moi je me sens mitigée. A la fois le cœur serré à l’idée que « ça y est, on y est », et à la fois perturbée parce qu’en effet on n’y voit rien. On fait comme les japonais avec la pierre. Bon… S’il a dû se passer quelque chose, je ne sais pas. Nous suivons les japonais qui vont du grand sanctuaire à d’autres petits plus loin. Ces petits sanctuaires, tout dorés aussi,  sont la représentation exacte du grand en modèle réduit. Je les trouve charmant. Finalement, la balade dans le Gekû devient agréable. J’apprécie les lieux, c’est paisible, une atmosphère étrange et reposante règne ici, et j’apprends à apprécier cet endroit pour ce qu’il est.

Par contre, énorme déception pour le Shûin… Pour un sanctuaire aussi important, quelle horreur… Quelle honte même je trouve. Même mon amie japonaise a trouvé ça surprenant lorsque je lui ai montré.

 


(Entrée au sanctuaire de Amaterasu, Naikû)

 

Nous ressortons du Gekû, nos esprits sont mitigés. Nous prenons le bus (qui vaut une fortune !) pour aller jusqu’au Naikû bien plus loin. Alors, qu’en sera-t-il cette fois ? Nous traversons le pont, l’allée de graviers. Les arbres sont entourés de Shimenawa et le lieu est absolument magnifique, de plus il pleut aujourd’hui et cela rend l’endroit encore plus mystique. Les gens vont, cette fois, se purifier carrément dans la rivière (mais pas tous). Nous approchons, le voilà, enfin. En haut des marches, les gens s’amassent sous le Torii. Nous montons à notre tour. Je savoure chaque marche, car chaque pas en avant me rapproche de Amaterasu. (C’est d’ailleurs contradictoire car je ne « crois » pas, mais je viens ici dans l’optique japonaise, mais je ne sais pas à quoi m’attendre). Nous y voilà… Et c’est pire. Cette fois, le sanctuaire est caché par 2 palissades, il n’y a rien à voir, rien du tout. Quelle déception… En même temps, devions-nous penser pouvoir approcher la déesse du soleil si facilement ? Et puis, au final, elle est « là », constamment présente, pas que dans le sanctuaire. Bref. Nous assistons à une cérémonie. Une amie qui a eu la chance d’avoir cette même cérémonie m’a dit avoir été déçue. Je comprends : les gens passent devant la palissade qui nous sépare d’eux, et la cérémonie a lieu ici-même. Payer des centaines d’Euros pour être à 3 mètres devant la palissade. De plus, tous les japonais s’avançaient en masse pour voir ce qui se passait, curieux. La cérémonie dure quoi, 5 minutes, et c’est finit. Mon amie m’a dit que dans l’autre sanctuaire, on s’en approche bien plus. Ce qui est beau par contre, ce sont les graviers : blancs et gris, en lignes de couleurs parfaites.

 


(Photo du Naikû, prise illégalement ^^ Gros zoom, tout au bout le toit du sanctuaire de Amaterasu).

 

Voilà. Nous redescendons, passant par d’autres petits sanctuaire modèles des grands. Il est temps d’aller manger et de réfléchir à ce que l’on vient de voir. Nous trouvons un petit resto’ qui ne paye pas forcément de mine. Papa a pris une soupe avec une crevette d’Ise (Ise Ebi), qui avait l’air très bon ! Moi j’ai pris des sashimi de Ise, un poisson servi en spécialité à Ise (hélas, le nom m’échappe). Histoire de goûter à la bonne nourriture locale ! Nous avons aussi acheté du pain dans une super bonne boulangerie que nous avons trouvé (très local n’est-ce pas ??!! ^^), et du lait de la préfecture de Ise !!! (On ne me refera pas !). Puis nous sommes rentrés.

 


(Le sanctuaire est tout tout au bout)

 

Verdict : je ne conseillerai pas Ise à n’importe qui. Après mûre réflexion, je suis très heureuse d’être allée là-bas, et j’ai tout de même apprécié. Mais je ne pense pas que cela figure dans la liste des favoris de Papa et Maman, loin de là. Un néophyte sera déçu je pense. Après, tout dépend de votre perception des choses. En tout cas, Ise n’est clairement pas une destination touristique d’étrangers vu que nous n’en avons croisé qu’un autre !

Bref, un très bel endroit dont l’atmosphère mystique règne si vous vous plongez dans l’univers japonais, important culturellement. Je suis contente d’y être allée, je n’y retournerai pas.

 

Un tout petit peu d’histoire si cela vous intéresse, concernant Amaterasu.

Selon les deux livres de mythes cités plus haut, voici comment Amaterasu est venue au monde.


(Graviers blancs et gris, reproduction dans le Naikû)

 

Izanagi et Izanami, les Kami primitifs. Izanagi étant une divinité masculine, et Izanami une divinité féminine. Ils sont à l’origine des Kami du Ciel et de la Terre, ainsi que des îles du Japon.

Izanami aurait donné naissance au dieu du feu (Kagutsuchi), et celui-ci aurait entraîné sa mort en la brûlant de l’intérieur. Fou de rage, Izanagi tue le Dieu du Feu, mais celui-ci explose et créé ainsi de nouveaux Kami (Divinité de l’Esprit et divinité de l’Epée notamment). Puis il descend dans le pays des morts (Yomi) sans autorisation, pour ramener sa femme. Elle lui promet de demander l’autorisation de revenir au Seigneur de Yomi, mais le prévient qu’il ne doit pas la regarder ; cependant, Izanagi la regarde, et il ne trouve qu’un cadavre en décomposition grouillant de vers. C’est alors que naissent les « huit tonnerres » qui tentent d’attraper Izanagi, qui parvient cependant à les fuir et revient sur Terre (j’ai trouvé une autre version où c’est Izanagi qui lance des morts à sa poursuite pour le punir, folle de rage qu’il l’ait regardé). Il tente alors d’ôter toutes les souillures en se lavant dans la rivière Tachibana. En procédant ainsi, de nouvelles divinités voient le jour : de son œil gauche voit le jour la Déesse du Soleil (Amaterasu), et de son œil droit voit le jour le Dieu de la Lune (Tsukiyomi) ; de son nez, naquit ensuite le Dieu des Tempêtes (Susano).

 

Après bien sûr, tout devient plus complexe, et assez extravagant parfois… ! C’est intéressant malgré tout.

 

J’espère que cet article vous a plu ! Désolée pour le manque de photos, je n’en ai presque pas il pleuvait et il n’y avait pas grand-chose à voir, donc.

 


(Reproduction en modèle réduit dans le Naikû)



11/06/2014
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