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Destination Kurama, randonnée jour 2

Jeudi 24 mai, jusqu'à Kibune

 

Mes yeux s'ouvrent.

Je me suis réveillée toute la nuit, toutes les heures à peu près, me demandant quand est-ce que le jour viendrait et si tout allait bien, si je n'étais pas encore inondée.

Que vois-je ?...

De la lumière...

Mais oui, c'est bel et bien de la lumière !!!

La nuit est enfin terminée, le jour s'est levé, je suis tellement heureuse !

Je me redresse, et je fais le point : ouf, je ne suis pas inondée ! Mon matelas et mon duvet sont toujours secs, et mes affaires ne sont pas si trempées. Je regarde l'heure : 6h. Très bien, je suis matinale, c'est parfait !

J'ouvre la porte de ma tente, et je vérifie mon sac, toujours là et pas trempé, yes ! J'ouvre l'autre porte (j'ai deux alcôves sur ma tente), et mes chaussures idem. Bien bien !

Je me lève, et je sors.

Etant donné que je suis dans la forêt, les rayons du soleil ne m'atteignent pas, mais je peux les voir. Je tourne le regard, et je vois un barrage, et les rayons du soleil percent au-dessus de celui-ci. J'ai une idée : je vais sortir toutes mes affaires, et aller me mettre sur le dessus du barrage, je vais tout étaler pendant que je prends mon petit déjeuner et que je me réveille. Donc me voilà à amener mes affaires, les étendre tout en mettant des choses un peu lourdes dessus pour ne pas que ça s'envole (je serais bien tiens si mes affaires tombent en bas du barrage !). Le soleil se lève doucement, la vue est magnifique.

Mon coeur bat la chamade devant tant de beauté ! Les couleurs sont magnifique, tout brille de mille feux, le soleil se reflète dans l'eau en contre-bas et à travers les branches, la rivière scintille, tout est si calme et si paisible.

Je me sens bien, je me sens mieux... Je suis prête à arpenter les terres une nouvelle fois, pour cette belle journée. Que de réconfort ce soleil chaud après la pluie battante d'hier... Je me sens heureuse.

 


 

Je décide de prendre mon petit déjeuner. J'amène mon réchaud, et je l'allume pour me faire un petit thé dans un premier temps, pendant que ça chauffe je m'assoie au soleil et je profite de ces lueurs magiques, je me réchauffe le corps, l'esprit, et le coeur. Je me sens bien, ici...

Mon eau boue, et je savoure un petit thé vert. De bon matin, cela met du baume au coeur. Je vérifie mes affaires, qui sèchent déjà, le soleil brûle déjà même si tôt le matin et je vais pouvoir repartir au sec. Seul hic : ma tente, les rayons du soleil ne pénétreront pas à travers la forêt et elle va rester mouillée, elle est vraiment trempée, même à l'intérieur étant donné que j'ai pendu mon imperméable et qu'il s'est écoulé à l'intérieur... Pas maline ? Moi ? ^^ Mais mon regard se fixe sur l'horizon. Je vois une plage. Je me dis même que si j'avais continué un peu plus, j'aurais pu y planter ma tente, j'aurais été mieux, et le soleil de ce matin aurait séché ma tente. Hum... Dommage, mais je ne pouvais pas savoir, et hier j'étais désespérée, et trempée !

Bon, mais j'y pense, et pourquoi je n'irais pas faire sécher ma tente là-bas ?! Je ne sais pas si je peux y accéder facilement. Alors je prends le parti de m'éloigner en laissant mes affaires derrière moi et d'aller voir comment y aller, à cette heure-ci il n'y a personne, et le temps que quelqu'un vole mes affaires, je serais revenue, puis on est au Japon. Je m'élance, je galope sur le chemin, joyeuse et en forme. Je vois la plage, sur la droite, je quitte le sentier et je me fraye un petit chemin. Et oui, je peux facilement y accéder ! Oh c'est beau !

Allez, adjugé vendu !

 


 

Je retourne en courant à mon lieu de camping, et je remballe tout, tout dans le sac. Je commence à remballer ma tente, trempée, et j'entends un vélo arriver. Wow, il est matinal lui ! Il est quoi, 7h du matin ? Le cycliste passe, et d'un coup il met un grand coup de frein et s'arrête brusquement, tourne la tête et me regarde avec des yeux exorbités, l'air complètement étonné (du genre "je rêve là ??"), et moi, je lui souris :

"Ôhayou Gozaimasu !" (bonjour) dis-je avec un grand sourire.

Il me répond bonjour à son tour, et me dit :

"Vous avez dormi là ??" Ce à quoi j'acquiesce, avec un petit sentiment de fierté dissimulé en moi (quand même, après tant d'angoisses, j'ai le droit d'être un peu fière de moi ^^).

Il n'en revient pas. Il me dit de faire attention, me salue, et s'en va. Je m'imagine qu'il vient ici régulièrement faire son VTT, et que cela doit bien être la première fois qu'il voit quelqu'un camper en ces lieux, et en sus, une Gaijin (étrangère) et une fille ! De quoi en étonner plus d'un, je le conçois.

 


 


 

J'emballe ma tente, et je m'élance vers la plage. Yahoo, soleil et bonheur !

Je m'installe sur les galets, et je remonte ma tente, en deux parties, l'imper d'un côté et la partie interne à côté. J'étale mes affaires à côté. Puis je fais chauffer l'eau de la rivière dans mon réchaud. Je me sens bien ici !

Au menu ce matin : riz et bouillon cube aux épices. Miam ! Mon ventre gargouille, j'ai hâte de manger. Au point où j'en suis, je m'en fiche de ce que je mange, je suis juste contente de me repaître.

Pendant que l'eau boue, j'en profite pour faire une petite méditation. Ce matin au programme de méditation, le souffle, et la concentration de mon esprit sur un objet inerte ; j'ai trouvé une magnifique pierre avec des reflets bleutés, et je l'ai choisie, je l'ai positionnée devant moi, et je l'ai fixée, essayant de stabiliser mon esprit. Difficile ! Car je ne cesse de penser qu'il va bientôt falloir que je reprenne la route. Ahhh notre esprit malicieux qui ne sait pas se poser...

 

Je remplis mon estomac, puis je fais la vaisselle. Ma tente est presque sèche, alors j'attends encore un peu. Une fois bien sèche, je remballe le tout, et je décolle, je remets mon sac sur le dos, qui s'allège avec le poids du riz en moins (dans mon ventre !!), et c'est parti, mes fidèles chaussures de randonnée aux pieds, je prends les chemins à 8h du matin, à la "fraîche", je mets entre guillemets car il fait déjà très chaud en fait, pour une fin de mois de mai.

 


 

La marche est difficile. Cela monte, tout le temps, constamment, sans jamais faire de replat. Oui, une longue montée sans répit. Je marche, lentement, si lentement, en pleine conscience là aussi. J'apprécie chaque pas. Je me sens en symbiose avec la nature.

Parfois, je crois que je suis arrivée au sommet (je suis censée aller au sommet de Mukai Yama) car il y a un replat et des bancs, mais non, c'est juste une fausse joie, et un peu de répit. A un endroit, après avoir beaucoup monté et après être passé par des endroits où les racines ressortent énormément au milieu du chemin (ce qui est magnifique et donne un avant-goût de Kurama, bien qu'il s'agisse de petites racines), il y a des bancs et une belle vue sur Kyôto. J'y fais une petite pause, pour savourer l'instant présent, le lieu. Rien que d'écrire, j'en ai des frissons, je me souviens de cet instant comme si c'était hier. Les rayons du soleil perçant à travers les feuillages des arbres, éclairant l'infime partie de Kyôto que l'on pouvait voir d'ici. Mais il faut reprendre la marche, et ça monte à nouveau, encore et encore, toujours... Mes épaules me font un peu mal, il est vrai que cela fait longtemps que je n'ai pas randonné un sac sur le dos. Pourtant mon sac est vraiment bien, et c'est la première fois que je ressens la douleur. Ce n'est pas grave, cela me rappelle que j'ai un corps physique, et cela me donne le courage de continuer de marcher.

 


 


 

Finalement, j'arrive au sommet : Mukai Yama !

420 m d'altitude... J'en ris. Oui j'en ris car c'est une colline... Elle n'est pas si grande, en Haute Savoie j'ai l'habitude de grimper de 1500 à 2000m d'altitude, et j'ai fais le Buet à 3000m d'altitude, et là cette marche m'a semblé si longue et fatigante, que cela me fait rire.

Allez, petite pause, j'immortalise l'arrivée au sommet, clic souriez ! Cela me fera un souvenir. Et puis, c'est Mukai Yama... Une colline inconnue, mais moi j'y suis allée, haha, c'est drôle.

 


 

Je reprends la marche, et je descends. Plus bas, j'arrive à une intersection, des panneaux proposent d'aller sur d'autres montagnes, mon moi aventurière me dit "oh oui, d'autres sommets ! Faut y aller !" et mon moi raisonnable me rappelle que je suis là pour aller à Kurama, que j'ai un gros sac, et que c'est pas pour s'amuser à arpenter les montagnes. Je continue donc sur ma lancée, direction Ninose.

 

Une longue descente s'ensuit, où je m'émerveille de chaque petite beauté de la nature. Là, sur un tronc mort, des champignons d'un vert pétillant et d'une grande taille semblent poser telle une oeuvre d'art au coeur de la nature ; ici, un petit lézard croise mon chemin et part se cacher dans les feuillages au sol ; un insecte coloré vie paisiblement sur une feuille d'arbre ; de jolies fleurs percent à travers la forêt ; des racines montrent leur présence au milieu du chemin ; des arbres sont illuminés par un petit rayon de soleil et semblent dire "je suis ton ami" ... Toutes ces petites merveilles de la vie, que l'on a oublié de regarder profondément, je les vois, je les admire, je les contemple, je les savoure. Je marche, d'instant en instant, dans le moment présent, je prends conscience de la chance que j'ai d'avoir des yeux qui me permettent de voir tout ce petit monde ; je prends conscience de la chance que j'ai de pouvoir écouter les oiseaux chanter et les arbres siffloter ; je prends conscience de la chance que j'ai de pouvoir marcher, de mes pieds, mes chevilles, mes jambes qui me permettent aujourd'hui de fouler le sol et de randonner ; je prends conscience de la chance que j'ai d'avoir des doigts, des mains, des bras, pour pouvoir équilibrer mon corps dans la marche, pour pouvoir toucher les feuilles des arbres ainsi que leurs troncs, et ressentir leur énergie.

Oui, je prends conscience de l'intégralité de mon corps, de mes capacités, et du bonheur d'être là, ici et maintenant.

Je suis en symbiose avec la nature, avec mon environnement.

Et je les remercie.

 


 

Plus bas, je croise enfin des gens, qui eux montent, certainement pour la demi-journée ou la journée. Des hommes d'une soixantaine d'années marchant en solitaires, pour la plupart, et aussi des couples, toujours d'un certain âge. J'ai l'impression que les jeunes ne sont pas intéressés par la randonnée, c'est le constat que j'ai fais ici au Japon en randonnant partout, la plupart du temps je croise des personnes retraitées ; peut-être que les jeunes n'ont pas le temps aussi.

Puis j'arrive tout en bas, au sanctuaire de Ninose "Moriya Jinja". Je connais ce sanctuaire, et je connais bien Ninose, car je suis venue randonner ici auparavant, sur d'autres chemins. Je regarde le chemin par lequel j'étais arrivée, avec nostalgie. J'étais, ce jour-là, allée à "Kumotori Yama" (article ICI "Kumotori Yama").

 


 

Après quelques remerciements aux Kami du sanctuaire pour m'avoir protégée et m'avoir apporté le soleil, puis après leur avoir demandé de me protéger encore un peu, je reprends la route.

Je traverse Ninose, petit village vraiment mignon, que j'avais déjà apprécié. Rien de spécial à voir, juste un très joli lieu où il doit faire bon vivre, le long de la rivière.

Je remonte par la route, le Kyôto Trail suit la route jusqu'à Kurama. Mais à un moment, en arrivant à Kibune, il n'y a plus de trottoir ou de chemin piéton, ni sentier, donc il me faut marcher sur la route. Je n'en ai franchement pas envie, mais je veux aller à Kurama, pas à Kibune. Je demande à une dame qui peint si elle sait (à la base je ne voulais pas lui demander, mais elle m'a vu chercher avec la carte et sa bienveillance japonaise l'a poussée à venir vers moi, donc j'ai accepté de demander le chemin), mais au final elle ne sait rien, elle m'oriente vers Kibune (ce que je ne voulais pas faire) et me dit d'aller demander à une vieille dame. Bon, tant pis, je prends le chemin, et je sais qu'il n'y a pas d'autre chemin que celui de la route, alors je me résigne, et je remonte jusqu'à Kibune par la route.

 


 


 

J'arrive dans le village, très joli. Il est 11h, et les gens sont déjà nombreux, les restaurants s'activent pour que les gens viennent manger chez eux en bord de rivière, avec leurs prix astronomiques. J'hésite, je me dis que je m'arrêterai bien au restaurant, mais tout est trop cher. A nouveau, mon statut de "pauvre" campeuse me ramène à la raison et m'empêche de craquer. Je monte à travers la foule, et surtout le nombre incroyable de voitures qui passent, cela m'agace même, car le joli lieu qu'est Kibune est gâché par cet incessant passage de voitures, dans la rue étroite où nous devons nous coller sur les bords pour les laisser passer, et voitures qui ne peuvent pas se croiser et donc s'agglutinent à certains endroits. Je me souvenais que Kibune était très touriste, bien plus que le village de Kurama, mais je ne me souvenais pas autant, je pense sincèrement que la quantité de touristes et de passage a augmenté en 4 ans, c'en est dingue et, à mon sens, ce village est dénaturé par tout cela.

Quel dommage ! Je ne suis pas aussi enchanté que je l'étais.

 

J'arrive aux sanctuaires, mais j'ai envie de me poser, de m'asseoir, et de manger, alors je passe et je ne visite rien. Je monte je monte je monte en espérant trouver un endroit calme et avec moins de monde et pas de restaurant où je puisse faire cuire mon riz avec mon réchaud, en toute discrétion. Je finis au bout du bout de la zone touristique de Kibune, au dernier sanctuaire. Et là, à ma surprise, sur la droite, il y a un petit escalier qui mène à une toute petit plage de galets le long de la rivière, en contre-bas de la route donc sans visuel direct, un peu caché, et personne ne s'y trouve. Parfait !

J'y descends, et je m'installe au bout à l'ombre. Ahh... enfin, je peux souffler, j'ai quitté la foule et je peux me reposer.

Je sors mon réchaud, et je me sers de l'eau de la rivière, je mets l'eau à chauffer.

 

Une jeune japonaise vient à son tour sur la plage, et s'installe au soleil, elle profite de l'endroit.

Puis une autre japonaise, d'une soixantaine d'années, vient à son tour, et vient se mettre à l'ombre, sur une pierre, non loin de moi, nous nous saluons discrètement. Je l'observe du coin de l'oeil, elle a son bentô tout préparé, et elle vient le manger ici. Je souris, car cela me fait plaisir de voir quelqu'un pique-niquer ici et non pas aller au restaurant.

Mon riz est prêt, je l'ai fais nature ce midi, je n'ai pas envie d'épices. Mon coeur est un peu douloureux, car je suis au pied de Kurama, c'est comme si ma destination est atteinte, mais je me sens seule et triste, loin de tous. Je ne sais pas où je vais aller cette nuit. Le chemin qui mène à Kurama est payant, j'ai demandé à la dame qui garde l'entrée à Kibune jusqu'à quelle heure je peux y passer, elle m'a dit que le chemin ne ferme jamais, mais qu'après il devient très sombre et dangereux ; la notion du danger au Japon est souvent surrevaluée, à les entendre on a l'impression que tout est dangereux ; alors j'hésite, dois-je monter à Kurama ce soir et aller dormir là-haut, mais je n'aurais pas de rivière ? Ou bien dois-je continuer au nord de Kibune et monter demain à Kurama ? Je ne sais pas, je suis un peu perdue.

 

J'ai fini de manger. Je me repose. Je n'attends rien, je vais bientôt reprendre la route, je pense que j'irai visiter les sanctuaires, ils sont sympathiques, je les appréciais bien quand j'y allais, et puis j'en garde un bon souvenir, ça fera passer le temps. Quand soudain, la japonaise âgée se lève, viens vers moi, et me tends quelque chose dans ses mains. Je lève la tête, reconnaissance, je prends ce qu'elle me temps, et je la remercie infiniment. Je suis touchée, cette japonaise vient de me mettre du baume au coeur... Elle m'explique qu'il s'agit d'un Dorayaki, c'est un gâteau à la pâte de haricot rouge (anko), entouré de deux "pancakes". Je me sens gâtée... Elle me quitte, et je sens les larmes me monter aux yeux. Je garde le gâteau pour plus tard, je le savourerai comme il se doit... Une douce rencontre pour ce jour, à nouveau...

 

Puis je reprends mon sac à dos, et je marche à travers la foule, je redescends dans Kibune. Les gens me regardent assez bizarrement parfois, étonnés, surpris, ou que sais-je. Je visite les sanctuaires, je remercie les Kami, je leur demande de prendre soin de cette dame qui m'a offert ce gâteau. Et comme d'habitude, je leur demande de me protéger.

A Kibune, il y a des arbres immenses entourés d'un shimenawa (une corde sacrée qui délimite un lieu sacré). Je prends le temps d'aller les voir, de poser mes mains sur leurs racines, de ressentir les énergies, et leur présence, je pose mes mains sur leurs troncs... Je m'imprègne de leur présence, de leur force, et je m'incline face à tant de beauté, face à tant de dignité, de sagesse.

 


 

Je souhaite acheter un Omamori (amulette japonaise) pour me protéger ou pour mes proches famille et amis, mais il y a un tel monde à la boutique du Yuki Jinja, le sanctuaire principal de Kibune, très populaire ; les gens peuvent y acheter de l'eau sacrée qui coule de la montagne dans le sanctuaire, ou bien des "Omikuji", des divinations que l'on achète au sanctuaire, ceux-ci sont particuliers car pour les lire il faut les mettre dans l'eau sacrée qui s'écoule dans le sanctuaire, et alors les divinations sont révélées ; c'est donc tellement fun et exceptionnel que les gens se pressent pour avoir le leur. Moi j'ai déjà pris des Omikuji 2x quand j'étais au Japon, à un autre sanctuaire, et 2x mon amie japonaise m'a dit que j'avais des prédictions exceptionnelles (genre les rares qu'on tire jamais lol), donc du coup je ne souhaite plus prendre d'Omikuji ! Quand la prédiction est mauvaise, on plie le papier et on l'attache au sanctuaire pour conjurer le mauvais sort, j'ai décidé que mes 2 tirages chanceux seraient suffisants pour ma vie ! ^^

 

Bref, donc il y avait tellement de monde qu'avec mon sac à dos j'arrivais pas à me frayer un chemin pour regarder les mamori sans taper personne. Cela m'a un peu fatigué, je commençais à avoir mal à la tête, j'ai abandonné et j'ai décidé de partir et de remonter direction la forêt.

Je suis donc retournée tout en haut de Kibune, puis j'ai continué de marcher le long de la route, et ensuite j'ai pris un chemin à gauche qui grimpait dans la forêt et suivait une rivière. A un moment, à droite de la rivière, il y avait une grande plage où j'aurais pu camper, mais il y avait déjà un homme d'une soixantaine d'année avec sa moto, qui avait planté une tente et qui avait fait un feu, je ne souhaitais pas rester à ses côtés, ne connaissant pas les gens. Je me suis donc éloignée, encore, encore, m'enfonçant dans la forêt...

 


 

Mais je ne trouvais aucun lieu propice pour planter ma tente. Sur la carte, le chemin s'éloignait ensuite de la rivière, je ne savais pas comment ça allait se terminer. Finalement, à droite du chemin, il y avait un lieu plat et sans arbres. Je suis allée voir, c'était parfait pour planter la tente. Le seul hic : très proche du chemin, si des gens viennent de sûr ils me voient. Tant pis... J'ai laissé mon sac. Mais, par acquis de conscience, je suis allée voir plus haut, le sac caché sous des buissons au cas où. J'ai grimpé grimpé... Et le chemin devenait difficile, étroit, glissant. Et finalement, c'était pas mieux pour planter la tente, j'ai décidé de rester là où j'étais. Je suis redescendue.

Mais il n'était que 16h, planter la tente maintenant ? Et prendre le risque que des randonneurs me voient et me disent que je n'ai pas le droit de camper ? Prendre le risque d'être délogée ? Pff... Je me suis posée un instant, sans monter la tente, juste un petit repos le long de la rivière. Puis j'en ai eu marre, et j'ai décidé de mettre ma tente pour m'installer et me mettre à l'aise.

 

J'ai dû tout nettoyer, car au sol il y avait des herbes hautes, des fougères, des branches... J'ai tout coupé à la main, ôté les grosses plantes, les pierres etc... Puis j'ai installé ma tente. Une fois montée, je me suis rendue compte que je n'avais pas mis les portes dans le sens que je voulais... Oh et puis zut, tant pis, ça ira bien quand même. J'ai installé ma maison dans ma tente, matelas, duvet... J'ai mis mes affaires rangées, bien comme il faut, en ordre... Je me suis mise à l'aise pour que mon moral suive.

 

Puis j'ai décidé d'aller me doucher. J'avais pris un maillot, un peu pudique dans le genre, au cas où des gens passeraient par là ^^ Donc j'ai mis mon maillot, et je suis allée dans la rivière. Glagla... ! C'était froid ! Je me suis mouillée les jambes, les bras, et... le corps c'était duuur !!! Lol, j'arrivais pas, puis j'ai fais ça vite car le soleil se couchait doucement et menaçait de partir derrière la montagne, et je voulais être au soleil, mais il commençait déjà à faire frais. Donc vite fait bien fait, je me suis lavée. Ensuite, je me suis mise à l'aise pour la nuit.

J'ai fais une petite sieste dans la tente, et j'ai écris mes récits sur mon livre.

 


 

Puis, à 6h, je me suis dit qu'il était temps de faire un feu de camp. Ma première seule ! Le long de la rivière, j'ai trouvé un endroit où il y avait du sable. J'ai installé des rochers pour faire un cercle. A l'intérieur, j'ai ramassé des tonnes de brindilles que je pouvais trouver de partout où j'étais, c'était le paradis des brindilles. Puis j'ai ramassé plein de branches de divers tailles et épaisseurs, et j'ai fais un tipi de branches au-dessus des brindilles dans le cercle. J'ai fais un gros tipi. Puis j'ai pris mes allumettes, et j'ai mis le feu aux brindilles. J'ai fais quelques allumages infructueux, mais très rapidement le feu a pris. Puis il a pris de l'ampleur... Et mon "petit" tipi s'est rapidement transformé en de gigantesques flammes. Wow ! Alors ça, pour un premier feu, c'est un méga premier feu ! J'étais fière de moi, c'était trop beau, il faisait chaud, et c'était trop cool.

Puis j'ai vu la fumée monter. Et là, l'angoisse est arrivée... Wow wow wow... Je suis pas si loin du village, et si les gens voient la fumée et croient qu'il y a un feu de forêt ??!! Panique intérieure (parce qu'il y a des panneaux de partout marqué "interdit de faire du feu" en forêt). Et si on me chope et qu'on vient me déloger et me renvoyer du Japon ?! Ouille ouille ouille... C'est dur la solitude, on se met à penser plein de choses négatives qui sont complètement idiotes.

 

Bref, j'ai observé mon feu dans la panique, et j'ai arrêté de l'attiser. Quand il a eu un peu réduit, j'y ai mis mon réchaud avec à l'intérieur de l'eau et de la polenta (que j'avais ramené de France ^^). Oui, mais les flammes étaient quand même un peu grande, ça dépassait de mon réchaud haha ! Et du coup l'eau s'est mise à bouillir très vite, trop vite. J'avais mis une blinde de polenta, trop ! J'ai dû rajouter de l'eau. Mais après mon réchaud cramait un peu sur les bords, normal vous me direz, mais quand même... Du coup je l'ai enlevé, la polenta avait bu toute l'eau, je pensais que c'était bon, j'étais prête à manger, miam !

 


 

Déception...

Hahaha ! La polenta n'était pas bien cuite, et c'était, pas dur, mais pas très tendre non plus. Puis c'était vraiment fade ! Je veux bien qu'en randonnée on ne mange pas très bien, mais là c'était tellement insipide et si mal cuisiné... Beurk ! Puis y'en avait une sacrée quantité. Heureusement, j'avais pris du sel et du poivre avec moi ! J'ai donc agrémenté mon met, et j'ai pu manger en appréciant un peu mieux. Mais impossible de finir.

Bon... Ben je sais quoi manger demain matin au petit déjeuner (désespoir intérieur à cette pensée... !). Je finis par mon Dorayaki, que je savoure dans l'instant présent, une douceur si puissante... !!! J'ai ensuite fais ma vaisselle, lavé les dents, et il était 7h du soir, la nuit allait tomber d'ici 30min.

 

Ah, question existentielle soudain !

Que faire de la polenta qui reste ? J'ai vu des panneaux attention aux ours, et autant le riz en grains pas cuit je me dis que ça les attire ptêtre pas, autant la polenta salée cuite... Dilemme. Les grands cèdres autour de moi n'ont pas de branches suffisamment basse pour que je mette ma bouffe, et j'ai un petit arbre près de ma tente. L'idiote que je suis a une super idée : je pends mon réchaud dans son sac à cet arbre, et j'y pends juste à côté mes grelots de sac à dos ! Je fais donc cela. L'idée, c'est que si un ours ou un singe vient voler ma nourriture, je l'entendrai car les grelots vont faire du bruit ! Fière de ma trouvaille, je vais dans ma tente, prête à me coucher.

 

La nuit commence à tomber... Et là les angoisses progressent. La peur... La peur qu'un animal vienne... La peur qu'une personne mal intentionnée vienne... La solitude qui me pèse... Je me sens seule, triste, j'ai peur. Et surtout, d'un coup, j'entends des crissements... Des grincements perçants et réguliers... Mon coeur bat la chamade, je PANIQUE ! J'ai juste trop peur, je tremble. Je me cache dans mon duvet, mais ces grincements me paniquent complet. J'ai l'impression qu'ils se rapprochent, puis s'éloignent... J'imagine des tas de scènes complètement loufoques, genre une armée de singes qui vient voler mon réchaud et se jettent sur ma tente lol ! Mon cerveau devient fou et s'imagine des histoires rocambolesques et même improbables.

Je me demande pourquoi je suis là, qu'est-ce que je suis venue faire, pourquoi je m'impose cela.

Puis mon cerveau paniqué réfléchi trop : et si j'entends les cloches, je fais quoi ? Si les cloches m'alertent qu'un ours est venu voler ma polenta, je fais quoi de toute manière ?! Je panique 2x plus ! Ah bien... Quelle intelligence Coraline... Du coup, je me dis qu'il vaut mieux que je récupère mes affaires, au moins les grelots. Mais j'ai si peur que je n'ose pas sortir, les crissements continuent... Je me persuade que ce sont les arbres qui grincent avec le vent, mais je ne peux m'empêcher de penser "pourquoi ils ne grinçaient pas la journée ????". Finalement, je prends mon courage à deux mains, et je sors de ma tente, avec ma lampe torche. Je vais décrocher les grelots, et j'hésite... Je laisse ma bouffe ?! Et si l'ours / les singes partent avec mon réchaud, je mange quand même ? Je suis un peu bête, alors je prends le tout, et je ramène tout dans ma tente.

 

Ouf... Je me sens mieux...

Ahhh ces arbres crissent toujours ! J'ai trop peur, je suis toute seule... Et s'il m'arrive quelque chose, qui le saura ? Personne... Mes pensées sont négatives et me chagrinent.
Puis je me remets à paniquer, j'ai ma bouffe dans la tente, un ours risquerait de venir la chercher... Rhâââ !

Je me fatigue toute seule.

Je finis par mettre des boules quies pour essayer de me mettre dans ma bulle et d'oublier tout ça, mais les grincements sont si perçants que même avec mes boules quies je les entends. Je suis désespérée.

 

Je resterai ainsi longtemps, très longtemps, à tenter de dormir, épuisée, en me stressant. J'essaye de méditer, de poser mon esprit sur mon souffle, mais la peur est si intense que je n'y parviendrai jamais.

 

Et finalement, je finirai par m'endormir, en me disant que cette nuit serait peut-être la dernière parce que j'ai envie d'abandonner, parce que je suis faible.

 

Une nouvelle douce journée avec une douce et éphémère rencontre, et une nuit difficile...

Demain... Sera finalement mon arrivée à Kurama.

 




20/06/2018
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